Les personnes qui n’ont pas de passeport suisse sont exposées à un double risque. Si elles tombent dans la pauvreté et ne parviennent plus à s’en sortir, leur statut de séjour risque de se fragiliser et elles pourraient même de perdre entièrement leur droit de séjour. Face à ces risques, nombre d’entre elles n’osent pas s’adresser aux autorités sociales.
Leur pauvreté se manifeste très concrètement. Elle se manifeste à travers les priorités que ces personnes doivent définir et aux questions qu’elles doivent se poser tous les jours. Un grand nombre de ces questions concernent le quotidien des enfants, eux qui ne sont qu’au début de leur vie. Pour quel enfant vais-je acheter des chaussures d’hiver ? Avons-nous les moyens d’acheter le lit pour enfant, ou un cadeau d’anniversaire ? Où trouver un appartement moins cher sans pour autant extraire les enfants de leur environnement familier ? Il manque quelques francs dans le porte-monnaie pour une entrée à la piscine, les lunettes ne peuvent pas être adaptées pour l’instant.
Les auteurs-rices du numéro 39 de terra cognita « La protection sociale dans la société suisse de migration » prennent sous la loupe les défis qui se présentent aux assurances sociales, développent des pistes d’explication pour les risques accrus qui touchent la population active sans passeport suisse et décrivent des ébauches de solutions pour prévenir la pauvreté. Les premières années sont déterminantes pour le reste de la vie d’un enfant. Elles constituent des étapes clé pour le bien-être général de l’enfant, pour ses chances au niveau de la formation et de l’activité professionnelle ainsi que pour sa participation sociale.
Petite enfance et pauvreté : conséquences pour l’avenir scolaire
Andrea Lafranchi est chercheur et professeur à la Haute école intercantonale de pédagogie spécialisée à Zürich. Dans son article, il aborde la question des conséquences de la pauvreté d’une famille sur les chances des enfants en matière de formation. Il montre comment les parents gèrent ce type de situation qui est souvent corrélé à leur historique migratoire et comment ils soutiennent leurs enfants.
En tant que responsable de recherche de l’étude longitudinale ZEPPELIN (2011-2033), le Professeur Lafranchi s’intéresse depuis de nombreuses années aux programmes d’encouragement de la petite enfance. Il étudie notamment le potentiel de l’encouragement de la petite enfance dès la naissance en termes d’amélioration des chances de formation pour les enfants issus de familles défavorisées sur le plan psycho-social. Les résultats déjà disponibles semblent univoques : l’accompagnement des parents grâce au programme d’encouragement « PAT – Mit Eltern Lernen » (PAT) prouve, grâce à un échantillon de familles défavorisées, que même trois ans après une intervention des effets positifs sont mesurables. Peu avant d’être scolarisés, les enfants qui ont bénéficié d’un programme d’encouragement précoce ont de meilleures compétences en allemand et en mathématique, ainsi qu’une meilleure auto-régulation et moins de problèmes comportementaux.
Pour Lafranchi, il est évident que nous devons urgemment combattre la pauvreté, car elle représente un risque sur le plan de la formation. L’inverse est vrai également : un niveau de formation faible représente un risque de pauvreté. Ce cercle vicieux doit être brisé. Au niveau international, on dispose maintenant de preuves de l’efficacité des interventions qui consistent à accompagner, à domicile, les familles vivant dans une certaine précarité et leurs enfants durant la phase vulnérable des premières années de la vie et à réduire ou supprimer les conséquences négatives de la précarité.
Plus d’informations :
terra cognita 39 « La protection sociale dans la société suisse de migration »
Le projet «Longitudinalstudie ZEPPELIN - Förderung ab Geburt»
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